Aricle Sortir des rotations trop simplistes
En cultivant plusieurs espèces, Philippe Lepelletier optimise tous les leviersmis à sa disposition pour lutter contre les bioagresseurs, tout en respectant ses sols.
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Lorsque Philippe Lepelletier a repris l’exploitation familiale, il y a une vingtaine d’années, la rotation était de type colza-blé-orge ou colza-blé-blé. « J’ai tout de suite recherché un système plus robuste afin de mieux résister aux aléas climatiques et aux bioagresseurs, explique l’exploitant de Lignol-le-Château (10). J’ai donc intégré d’autres cultures qui apportent une alternative à la fois agronomique et économique. »
L’agriculteur explore de nouveaux marchés commerciaux, car il a la capacité de stocker. Parmi les cultures de niche qu’il introduit à l’époque, figurent le chanvre, le millet ou le lin oléagineux. « Aujourd’hui, je consacre aussi une quarantaine d’hectares à la production de semences (avoine brésilienne, orge de printemps et épeautre). C’est une sécurité d’être sous contrat », confirme Philippe.
Pourtant, il y a plus de dix ans, la résistance des vulpins aux fops et aux dimes (groupe Hrac A), suivie peu de temps après par celle aux sulfonylurées (groupe B), l’a amené à modifier encore plus son assolement pour revenir davantage sur des bases agronomiques. « Je me suis inspiré des agriculteurs biologiques pour contrer les pathogènes. Ainsi, le choix des cultures se fait à la parcelle et en réponse à la présence de telle ou telle adventice », souligne-t-il.
Par exemple, dès que l’apparition de vulpins pose un problème, il réintègre une, voire deux cultures de printemps. « Sur un de mes blés, plus aucun programme herbicide ne fonctionnait. J’ai constaté jusqu’à 500 pieds par mètre carré », se remémore l’exploitant aubois. Il a tout d’abord mis un couvert d’avoine qu’il a détruit à l’aide de glyphosate, puis il a semé une orge de printemps sur laquelle un antigraminées a été passé. Un couvert (avoine + féverole + lentille) suivi d’une avoine de printemps ont complété ce dispositif.
Des céréales étouffantes
Peu consommatrices d’intrants, les avoines de printemps (blanche ou brésilienne), cultivées depuis plusieurs années chez Philippe, sont de bonnes têtes d’assolement. Même s’il n’existe pas d’antigraminées homologués sur ces cultures, ces dernières disposent d’une action allélopathique et sont étouffantes pour les mauvaises herbes. « Leurs racines ont un effet bénéfique car elles dissolvent le phosphore bloqué dans le sol. Elles activent aussi la macrofaune et la microfaune. Au final, elles laissent une texture très intéressante », estime l’agriculteur.
L’épeautre, également en multiplication de semences, a, lui aussi, un pouvoir étouffant. « Dans l’esprit d’Ecophyto, c’est une culture très tolérante aux maladies », constate Philippe, qui appartient au réseau Dephy (voir encadré ci-contre).
Quant au colza, avec la problématique des insectes qui progresse, sa culture ne revient désormais que tous les six ans. Depuis trois ans, il a décidé de lui associer des légumineuses - souvent des lentilles. « Aujourd’hui, j’emploie moins d’herbicides et d’insecticides. Quant à mes rendements, ils sont passés de moins de 20 q/ha à 25-27 q/ha », souligne-t-il. Le cas échéant, cette production lui laisse la possibilité de passer un Kerb Flo (groupe K1) pour venir à bout des vulpins résistants dans la rotation.
Diversifieravec des légumineuses
Depuis deux ans, la lentille s’est ajoutée aux espèces cultivées. Elle est valorisée sous contrat pour l’alimentation humaine et en semences fermières. « Cette année, j’ai atteint un rendement très satisfaisant de 25 q/ha », précise Philippe.
Si elle est exposée aux ravageurs tels que la bruche, au même titre que les autres légumineuses, Philippe n’a pas subi de nuisances jusqu’à présent. « La diversité de cultures permet de baisser en partie la pression des bioagresseurs », complète-t-il. La lentille présente aussi l’avantage de ne pas être exposée à la bactériose, qui a fait des dégâts ces dernières années sur pois d’hiver. Philippe remplacera cette culture par davantage de féverole de printemps et de lentille l’an prochain.
Sans cesse en train de se remettre en question (*) et à la recherche de nouveaux marchés, il pourrait en profiter pour introduire du pois chiche.
(*) Notamment grâce à son groupement de développement agricole (GDA) de Champignol.
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